Aujourd’hui, nous vous présentons une œuvre littéraire réalisée dans le cadre de l’exposition de Claire Ducène Croisière au Cercle polaire. Été 1929. Il s’agit d’un vrai-faux journal intime écrit par Françoise Delmez, dont les textes nous emmènent découvrir les paysages enneigés de la Norvège. Bien plus, c’est un voyage intemporel à travers les terres que Léon Losseau a foulés en été 1929, à bord du Brazza.
Un projet d’écriture pour un voyage intemporel en Norvège
En 1929, un avocat belge du nom de Léon Losseau entreprit un long périple en bateau au Cercle polaire arctique. À l’époque, la Norvège, comme État monarchique, n’avait qu’une quinzaine d’années d’existence.
Il avait préparé son voyage et, parce qu’il était méthodique, prudent et que, pour ce collectionneur dans l’âme, le moindre courrier, la moindre image, insignifiants aux yeux de beaucoup, avaient de l’importance, on a retrouvé, intacts, de nombreuses années après sa mort, bien rangés dans des boîtes à cigares Lafon de type « La Favorita » (Grand Prix à l’Exposition universelle de Paris en 1889), ces boîtes ayant elles-mêmes été soigneusement disposées dans une caisse recouverte de papier journal, tous les souvenirs de son aventure.
Comme elles revenaient sans cesse à cette caisse et ne se lassaient pas d’en dresser l’inventaire, Claire Ducène et Françoise Delmez ont peu à peu conçu le projet de rendre vie à cette mémoire endormie sous d’épaisses couches de poussière : d’écrire, Claire en plasticienne, Françoise avec des mots, le journal intime de ce voyage sur les mers de Norvège.
Bien sûr, elles savaient qu’il serait impossible, et sans doute peu souhaitable, d’atteindre la vérité de ces instants de 1929. Qu’elles ne connaîtraient jamais vraiment Léon Losseau, dont elles avaient parfois l’impression qu’il était devenu un ami. Elles ont pourtant mis leurs pas dans les siens et consciencieusement préparé leur équipée, accumulant elles-mêmes leurs propres traces, remplissant progressivement leurs « boîtes à cigares ».
Comme lui, elles ont consulté une voyante avant leur départ. Comme lui, elles ont rêvé en feuilletant des livres. Elles se sont souvenues des sagas de leurs cours de littérature comparée. Elles se sont demandé si les choses seraient différentes, après. à l’heure où les distances deviennent insignifiantes à l’aune de la planète, le glissement d’un bateau dans le blanc et le gris sans cesse recommencés de l’Arctique est un chemin d’intimité.
Léon Losseau, ce n’est pas Françoise Delmez. Mais Françoise n’est pas ici non plus tout à fait elle-même et revendique le mensonge – la fiction ? – pour atteindre, à travers les espaces différés, la vérité des émotions.
Françoise Delmez est professeur de français et responsable du secteur littérature pour la Province de Hainaut. Elle aime la mer, les lieux que les hommes ont choisi d’oublier ou qu’ils ont été contraints d’abandonner.
Claire Ducène est artiste plasticienne et s’intéresse à la mémoire du temps et des espaces. Grande voyageuse dans l’âme et passionnée de littérature, elle collecte des images et s’inspire des contrées proches et lointaines, réelles ou fictives, passées et présentes.
Françoise Delmez, Les nombreuses étendues ouvertes de la mer. Journal d’un voyage au cercle polaire arctique, avec des illustrations de Claire Ducène et une préface d’Olivier Terwagne, Éditions Traverse, Bruxelles, 2018.
Prix de vente : 14 €, exemplaires disponibles en permanence dans la boutique du Centre d’Interprétation de la Maison Losseau.